Maryse Chauvin

Retour à la liste

Ajouté le 15 janv. 2022

LA FACE CACHEE DE L'ARTISTE


A mon sens, il y a deux grandes étapes à franchir pour un peintre : se trouver et accepter de vendre sa passion.

Si ces étapes semblent à première vue anodines pour une personne non peintre, je peux vous affirmer que passer de l'ombre à la lumière n'est pas simple que ce soit pour coucher une part de soi dans ses toiles ou expliquer son travail notamment le contexte d’une réalisation !

 

Lorsque l'on peint ….

La première étape est déjà de trouver son identité ! Et trouver son identité commence par trouver LA technique qui fait vibrer ses créations.  Pour ma part, j'ai commencé par le crayon gris : cela permet de dessiner partout, de jouer sur les ombres et les lumières, de s'entrainer facilement et à n'importe quel moment. Puis je suis passée aux feutres … noirs ! Ce n'est pas une grande révolution si ce n'est que lorsque le feutre dérape, le rattrapage est beaucoup plus compliqué !!!! Les astuces pour récupérer le trait égaré ont leurs limites !!!!.

Comme la télévision, j'ai fini par passer à la couleur. Lorsque j'ai découvert la peinture à l'huile, cela a été la grande révélation.  Oh, j'ai bien essayé d'autres méthodes mais ce petit frisson d'excitation à la création n’a jamais résonné de la même façon. L'aquarelle m'a laissée parfaitement de glace.  L'acrylique sèche trop vite pour moi : j'ai besoin d’avoir le temps de ressentir la peinture, de la modeler au fur et à mesure pour m'en imprégner et révéler le résultat escompté. L'acrylique a des propriétés telles que ponctuellement je peux l'utiliser mais elle ne me permet pas de m'épanouir pleinement. Quant au pastel, les jeux sont beaucoup plus nombreux, le champ des possibilités beaucoup plus ouverts mais, j'ai mes périodes : un coup, je m'y lance puis j'ai une période de boudage ! Allez savoir pourquoi ……

Mais, la peinture à l'huile, c'est tout autre chose. Le fait de pouvoir y revenir même après quelques jours, alors que la peinture a commencé à s'affirmer sur la toile, ajuster le trait pour modeler l'effet final. Je dois avouer que ce jeu entre moi et la matière est extatique.

Lorsqu’un peintre peint, il dévoile sur une toile une partie de lui. Et ça, ce n'est aussi possible que s'il est en symbiose avec la matière avec laquelle il travaille. Une œuvre d'Art prend toute sa valeur dans la transcription de l'état d'esprit de la personne qui tient le pinceau. Je dis bien « tenir » car si souvent je le guide, je m'aperçois que parfois c'est lui qui mène mon geste car peindre, c'est se vider l'esprit et l'esprit étant facétieux, il prend parfois les commandes sur le geste ! Ce lâcher n'est possible que si le mariage entre l’artiste et sa technique est parfait

Il y a ensuite un second lâcher qui est beaucoup plus compliqué, c'est justement la seconde grande étape à laquelle je faisais référence : l'art est le miroir de l'âme et l’artiste est lié à sa toile. Si nous la faisons naitre et la faisons grandir, il arrive ce moment où il faut passer le relai afin qu'elle puisse continuer à s'épanouir.  

 

Ce moment redouté : la transmission

On pourrait croire que la continuité évidente de la création d'une œuvre d'art est sa vente …. Et bien non. Tel un parent avec son enfant qu'il aurait vu grandir, il n'est jamais évident de couper le cordon pour passer le relai même si c’est tout ce qui fait la quintessence de l'Art : le partage ! Mais c'est aussi ce qui en fait toute sa complexité. Regardez ce parent qui voit la chair de sa chair partir avec une personne inconnue pour continuer sa vie. En tant que peintre, c’est exactement le même sentiment : un tableau ne se crée pas sans que l’Artiste n'investisse une part de lui. Nous retranscrivons toujours une partie de nous-même dans nos œuvres. Il nous faut donc accepter de transmettre cette petite part de nous à une personne que nous ne connaissons pas. A cette introduction dans notre intimité, il faut de plus franchir une étape cruciale au préalable : le regard des autres. Se mettre à nu sur une toile, y coucher ses convictions, son ressenti, dans l'intimité de son atelier est autrement moins intimidant que de l'afficher devant la première personne venue. Chaque artiste vit cette épreuve à sa façon. Certains ne franchiront jamais le cap car trop de sentiments, trop de jardins secrets sont engagés. D'autres le feront « sans se retourner », sans hésitation ; enfin, certains prendront le temps qu'il faut pour assumer la critique qui en découlera. Ce n'est pas évident de savoir comment nous accueillerons les commentaires des visiteurs voir de nos pairs. Pour ma part, il m'a fallu un certain temps car si en atelier partagé, nous échangeons nos commentaires, un lien d'intimité s'est créé au fil du temps. Ce lien permet d'établir un rapport de confiance avec l'autre ; ainsi s'ouvrir se fait plus naturellement.

Exposer lors d'une exposition devant un public est complètement différent : nous sommes mis à nu devant des personnes que nous ne connaissons pas. Il n'est pas évident d'expliquer dans ce contexte l'intimité de création du tableau qu'ils regardent…. D'autant plus si la peinture est abstraite car, du moins pour ma part, c'est là que je m'ouvre le plus. Rien n'est plus simple que d'ouvrir une part de soi dans une écriture plus subtile qu'une représentation figurative !  

 

A votre disposition pour poursuivre cette discussion à partir de « Contact » depuis mon site marysechauvin.com !

Créé avec Artmajeur